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Communiqué

Le Tribunal administratif de Dijon sonne le glas d’ERSCIA, donnant raison à des citoyen(ne)s !

Retrouvez ici le communiqué transmis le 16 avril 2015 par LVNAC, DECAVIPEC et le Collectif de Marcilly

ERSCIA, une méga-scierie à 50km de la vallée du Cousin, ça vous dit quelque chose ? Sinon, lisez notre enquête quasi-exhaustive « La vérité sur ERSCIA ». Bonne nouvelle : saisi par des citoyen(ne)s, Le Tribunal administratif de Dijon vient de rendre son jugement sur le fond, confirmant que le projet présentait des lacunes et des insuffisances rédhibitoires. Ce qu’il faut retenir : les grands sujets, comme l’avenir de nos forêts, ne doivent pas êtres abandonnés à la politique et à la finance. Point de fatalisme ! Plus que jamais, on vous encourage à venir, avec vos questions, à notre table ronde sur la forêt du 2 octobre 2015.

Qui est à l’origine de ce communiqué... et de cette victoire juridique contre ERSCIA ?

Les trois entités ci-après, qui viennent de gagner définitivement la bataille juridique contre ERSCIA en s’opposant à la volonté de quelques élus locaux... sont exclusivement portées par des citoyen(ne)s.

  • LVNAC (Loire vivante Nièvre-Allier-Cher) s’est créée en 1990 au moment de la grande contestation contre l’édification de quatre barrages sur la Loire. L’une des grandes victoires des défenseurs de l’environnement et ... du bon sens. C’est une association de défense de l’environnement qui consacre ses forces à la défense de l’eau (les rivières, ses utilisations en agriculture ou dans l’industrie). Elle est agréée sur le plan départemental de la Nièvre.
  • L’association DECAPIVEC a été créée en 2004 suite à des problèmes engendrés par une installation polluante, illégalement implantée (traitement de déchets chimiques) ; elle a reçu son agrément départemental en mars 2008 et ainsi élargi ses objectifs et son champ d’action.
  • Le collectif des habitants de Marcilly, qui n’est pas une association, s’est constitué juste en 2012 après la publication, le 21 mars 2012 d’une série d’arrêtés préfectoraux donnant le feu vert au projet ERSCIA.

Pour rappel, une quatrième entité, Adret Morvan, s’était plus portée sur le champ médiatique, en occupant le terrain et les réseaux sociaux. Pour tout savoir, lisez La vérité sur ERSCIA.

Rappel chronologique situant la première action conjointe des Loire Vivante, DECAPIVEC et du collectif de Marcilly

  • 2009, le 29 septembre : Première présentation officielle du projet ERSCIA France ;
  • 2010 à 2011 : Études préparatoires et résumés non techniques ;
  • 2011, le 2 novembre : Avis d’ouverture d’enquêtes publiques conjointes par la préfecture de la Nièvre ;
  • 2012, le 24 janvier : Rapports et conclusions de la commission d’enquête sur le défrichage, l’aménagement, les travaux au titre des articles de la loi sur l’eau, la construction et l’exploitation : de nombreuses questions de l’association DECAPIVEC restent sans réponse ou gênent visiblement le maître d’ouvrage ;
  • 2012, le 14 février : le CNPN donne un premier avis défavorable, « au vu des insuffisances flagrantes du dossier ». Par exemple, l’expert délégué s’étonne que la compensation des 100 ha de forêt mature sacrifiés par le projet se résume à une proposition d’acquisition, par le Conseil général de la Nièvre, de terrains déboisés qui ne seront pas replantés ;
  • 2012, le 21 mars : Sans tenir compte cet avis défavorable du CNPN, la préfecture de la Nièvre publie une série d’arrêtés pour donner son feu vert. Résultat des courses ? En plus des associations DECAPIVEC [16] et Loire vivante Nièvre-Allier-Cher, un collectif des habitants de Marcilly est créé. Ces trois entités font des requêtes au Tribunal administratif de Dijon pour demander la suspension de l’arrêté d’autorisation de défrichement (n°2012004) ainsi que celui portant dérogation à l’interdiction de destruction, altération, dégradation de sites de reproduction ou d’aires de repos d’animaux et de transport d’espèce animales protégées (n°2012081-0002).

Pour avoir toute la chronologie, lisez La vérité sur ERSCIA.

Voici dans son intégralité le communiqué que François LABALLERY nous a transmis le 16 avril 2015 au nom de LVNAC, DECAVIPEC et le Collectif de Marcilly

Le Tribunal Administratif de Dijon a rendu (le 14 avril) son verdict sur les deux derniers recours examinés en audience le 27 mars 2015.

Arrêtés préfectoraux des 10 juillet 2012 et 31 janvier 2013 accordant une dérogation à la destructions d’espèces protégées, de leurs habitats et de leur déplacement à la société d’économie mixte Nièvre Aménagement (dont le capital appartient pour plus de 75 % au Département et à la Ville de Nevers).

Les juges du Tribunal Administratif ont confirmés toutes les décisions déjà prises sur ce sujet depuis juin 2012 aussi bien à Dijon qu’au Conseil d’État à Paris.

Pour défricher une zone naturelle abritant de nombreuses espèces protégées afin d’y installer une activité industrielle ou de services, il faut présenter des justifications précises résumée par la notion de « raison impérative d’intérêt public majeur ». Cette notion comporte trois conditions à remplir impérativement en même temps.

Il faut démontrer que l’implantation prévue ne peut pas être envisagée sur un autre site. Il faut également démontrer que l’activité envisagée correspond à un besoin social ou économique à caractère de service public. Enfin, il est nécessaire que les mesures compensatoires soient proportionnées à la destruction des espèces protégées et de leurs habitats.

Sans avoir à rentrer dans le détail de la première et de la troisième exigence, les juges ont toujours estimé que le projet ERSCIA à Sardy, dans le bois du Tronçay, ne présentait pas d’intérêt public majeur, la création d’emplois ne faisant pas partie de ces motifs. Sinon, TOUS les projets de cette nature seraient admis comme tel ! Nous affirmons que le projet ERSCIA à Sardy est une initiative d’ordre privé à caractère spéculatif, voire pernicieux à bien des égards.

Sur ce sujet, la jurisprudence s’étoffe régulièrement avec constance. Le projet ERSCIA ne répond définitivement pas à la définition d’une raison impérative d’intérêt public majeur.

Nul doute que la faiblesse des solutions géographiques alternatives a pu influencer les juges. En effet, la question est posée depuis le début, lancinante, toujours sans réponse : pourquoi, diable, aller se fourrer dans une zone naturelle mal desservie et présentant de nombreux handicaps (absence d’eau, d’électricité, de réseaux informatiques, de routes convenables, etc …) alors que des centaines d’hectares de zones industrielles restent inoccupés dans la Nièvre ? Quant aux mesures compensatoires présentées dont certaines sont totalement hypothétiques, elles étaient loin de correspondre aux destructions envisagées.

Arrêté préfectoral du 19 avril 2012 autorisant la société ERSCIA France à implanter une unité industrielle sur le site du Bois du Tronçay – commune de Sardy-lès-Èpiry.

Notre contestation portait sur des principes importants (absence de démonstration des capacités techniques et financières d’ERSCIA, pas de plan d’approvisionnement), faiblesse, voire absence, d’étude d’impact sur des points spécifiques à cette implantation (comme l’approvisionnement en eau dans l’Yonne et le rejet des eaux de process dans le ruisseau de Sardy) et légèreté sur différents points techniques (caractéristiques de l’incinérateur, combustibles utilisés, rejets aériens, traitement des REFIOM et des mâchefers, origine des déchets etc …).

Inutile de préciser que l’ensemble de ce dossier a nécessité de nombreuses recherches dans de nombreux domaines très éloignés des questions environnementales.

En fin de compte, les juges du Tribunal Administratif de Dijon ont retenu quelques motifs qui montrent bien les faiblesses considérables de ce dossier et l’amateurisme dont on fait preuve les promoteurs du projet … tout comme ceux qui les ont soutenus.

Tout d’abord, les juges ont pointé l’absence de démonstration des capacités financières d’ERSCIA. Lorsque l’on s’engage dans un projet de cette nature et de cette ampleur, le minimum est bien d’exposer les moyens financiers dont on dispose, surtout lorsque l’on prétend bénéficier de plusieurs dizaines de millions d’euros de subventions et d’aides publiques diverses et variées !

Si les juges ont estimé qu’il pouvait y avoir une présomption de capacités techniques à faire fonctionner les trois branches prévues dans le projet (production d’énergie par l’incinération de déchets de nature diverse, production de pellets, plateforme de sciage), ils n’en ont pas moins relevé de grosses lacunes dans l’étude technique de l’installation. Ainsi, l’approvisionnement en eau (15 à 18 m3/heure) des installations à partir de l’Yonne était très mal étudié et incomplet, les rejets des eaux de process dans le ruisseau de Sardy ne prenaient pas en compte la nature de cette rivière classée zone de frayères pour plusieurs espèces protégées. « L’étude d’impact ne peut pas être regardée comme ayant procédé à une analyse suffisante, d’une part, des capacités et des conséquences du prélèvement d’eau pour le process industriel sur la rivière de l’Yonne, d’autre part, des conséquences des rejets des eaux de process dans le milieu naturel … ».

Nous considérons ce jugement avec énormément de satisfaction car il porte sur des questions financières et techniques. Il démontre que même sur des aspects purement industriels, le projet d’ERSCIA présentait des lacunes et des insuffisances rédhibitoires.

François LABALLERY – 16 avril 2015
LVNAC – DECAVIPEC – Collectif de Marcilly

Par Thiébaut

Publié le vendredi 17 avril 2015

Mis à jour le dimanche 14 juin 2015

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